Pourquoi la Cnil enquete sur l’application ClubHouse – Entretien avec Le Point

avril 5th, 2021 | Posted by Claude-Etienne Armingaud in Communication | Données Personnelles | Entretien | Presse

Spécificité propre à cette application, on y accède par cooptation, ce qui attise l’appétit des profanes pour ce club très select que fréquentent Elon Musk, Mark Zuckerberg et Bill Gates. « C’est un très bel outil du point de vue humain et intellectuel, dans lequel les personnes se sentent valorisées », estime l’avocat Claude Armingaud, associé du cabinet K&L Gates. Ce spécialiste du droit des nouvelles technologies et de la propriété intellectuelle est d’ailleurs devenu, comme plusieurs de ses confrères, un membre actif de ClubHouse. Il y anime le salon privé « The Privacy House » dédié à la protection des données personnelles.

Parmi les anomalies recensées, l’information sommaire des utilisateurs au moment de leur inscription et un accès à leurs contacts qui enjambe leur consentement. « Lorsqu’une personne s’inscrit, le réseau accède à tous ses contacts et à leurs numéros de téléphone, ce qui constitue une collecte indirecte de données personnelles au sens du RGPD. En principe, ces contacts doivent être informés de cette collecte au plus tard dans les 30 jours suivants, et doivent être en mesure d’exercer leurs droits d’opposition et d’accès à leurs données à tout moment. Sinon, une telle collecte pourrait constituer une violation majeure et caractérisée du RGPD », décrypte Me Armingaud.

Toutefois, relève Me Armingaud, « le risque existe que la plateforme, qui ne dispose pas encore d’un réel modèle économique, enregistre les conversations pour faire de l’analyse de contenu et du marketing. Si tel est le cas, et qu’elle n’en informe pas les utilisateurs, c’est un manquement au RGPD. Si elle compte le faire ultérieurement, elle devra procéder à cette information », détaille-t-il.

La question de l’enregistrement des conversations se pose avec d’autant plus d’acuité que « ClubHouse travaille avec un prestataire établi en Chine, où, d’ailleurs, l’application est interdite », note l’avocat. La voix est une donnée biométrique ultrasensible qui permet d’identifier la personne et, à travers elle, son état de santé, ses opinions et prises de position, autant d’informations à protéger dans le contexte tendu des relations avec la Chine. « Dès lors qu’elle est associée à un profil, la voix fait l’objet d’une protection renforcée du RGPD. Celui-ci interdit de traiter la voix à des fins d’identification », rappelle Me Armingaud.

Pour l’heure, l’enquête doit permettre d’établir si le RGPD s’applique à la société et si ses règles sont respectées. Si tel n’est pas le cas, « la Cnil pourra, le cas échéant, faire usage de ses propres pouvoirs répressifs » a-t-elle prévenu. Néanmoins, nuance Me Armingaud, en cas de sanction, « la société ne possédant aucun établissement en Europe, rien ne garantit que sa décision sera exécutée aux États-Unis, ce qui serait un véritable camouflet pour le RGPD ».

Lire l’article entretien complet avec Laurence Neuer sur LePoint.fr

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